Absence de faute grave en cas de poursuite du contrat d’agence commerciale après résiliation aux torts de l’agent commercial

Absence de faute grave en cas de poursuite du contrat d’agence commerciale après résiliation aux torts de l’agent commercial

Cass.com., 4 décembre 2024, n°23-16.962

 

 

Ce qu’il faut retenir :

Dans cet arrêt, la Cour de cassation a jugé qu’une faute de l’agent commercial ne peut être qualifiée de grave si le contrat d’agence commerciale s’est poursuivi, même temporairement, dans la mesure où une faute grave est incompatible avec la poursuite du contrat.

 

Pour approfondir :

Le 31 mars 2015, un contrat d’agence commerciale est conclu entre un agent commercial et son mandant.

Devant le Tribunal de commerce de Pontoise, l’agent commercial a sollicité la résiliation judiciaire du contrat d’agence commerciale, avec effet au 26 août 2019, pour non-paiement de ses commissions, violation de son exclusivité et défaut de coopération et d’information, et en paiement des commissions dues au titre des contrats conclus pendant la durée d’exécution du contrat et au titre du droit de suite.

A titre reconventionnel, le mandant a sollicité la résiliation judiciaire du contrat aux torts exclusifs de l’agent commercial, avec effet au 18 avril 2018, pour manquements constitutifs d’une faute grave, notamment en ne prospectant pas la clientèle, et en ne développant pas les ventes.

Dans son jugement du 27 janvier 2021, le Tribunal de commerce de Pontoise a prononcé la résiliation du contrat d’agence commercial au 26 août 2019, aux torts exclusifs du mandant.

Le mandant a interjeté appel du jugement devant la Cour d’appel de Versailles.

La Cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 25 mai 2023, a infirmé le jugement, et a prononcé la résiliation du contrat d’agence commerciale, à date du 18 avril 2018, aux torts exclusifs de l’agent commercial, et a rejeté sa demande de paiement de l’indemnité de préavis due en cas de cessation du contrat. Le mandant a été condamné à verser les commissions dues en exécution du contrat d’agence commerciale.

L’agent commercial a formé un pourvoi en cassation, invoquant que le manquement litigieux n’était pas de nature à rendre impossible le maintien du contrat, d’autant que (i) la relation contractuelle s’est poursuivie après la date de résiliation du contrat fixée judiciairement, soit le 18 avril 2018, et (ii) le mandant avait fait part à l’agent commercial, dès le mois de janvier 2019, de sa volonté de poursuivre l’exécution du contrat.

Dans son arrêt du 4 décembre 2024, la Cour de cassation a rejeté le raisonnement de la Cour d’appel.

Dans l’arrêt commenté, la Cour a rappelé, aux visas des articles L. 134-11, L.134-12 et L.134-13 du Code de commerce, que :

- Celui qui commet une faute dans l’exécution du contrat d’agence commerciale est privé de son droit à préavis.
- En cas de cessation des relations contractuelles entre le mandant et l’agent commercial, l’agent a droit à une indemnité compensatrice.
- La réparation n’est pas due lorsque la cessation du contrat est provoquée par la faute grave de l’agent commercial, ou lorsqu’elle résulte de l’initiative de l’agent commercial, à moins qu’elle ne soit justifiée par des circonstances imputables au mandant.

Retenant que la faute grave est celle qui rend impossible le maintien du lien contractuel, la Cour de cassation a ainsi jugé que la faute reprochée à l’agent commercial en l’espèce ne présentait pas les caractères de la faute grave, en raison de la poursuite de la relation contractuelle après le 18 avril 2018, jusqu’en août 2021, à la demande du mandant, et ce peu importe que la relation contractuelle fût résiduelle.

Autrement dit, la faute grave de l’agent commercial doit présenter un degré de gravité tel qu’elle rend impossible la poursuite de l’exécution du contrat d’agence commerciale.

 

À rapprocher : Cass. com., 4 déc. 2024, n°23-19.820 ; Cass. com., 15 oct. 2002, n°00-18.122

 

 

Un article rédigé par Léna BIRONNEAU du département Concurrence, Distribution, Consommation