Une faute grave de l’agent commercial, découverte après la résiliation du contrat, ne prive pas ce dernier de son indemnité compensatrice de fin de contrat

Une faute grave de l’agent commercial, découverte après la résiliation du contrat, ne prive pas ce dernier de son indemnité compensatrice de fin de contrat

CA de Montpellier, chambre commerciale, 30 av. 2024, n°22/03488

 

Ce qu’il faut retenir :

Dans un arrêt du 30 avril 2024, la Chambre commerciale de la Cour d’appel de Montpellier rappelle qu’un agent commercial ne peut se voir priver de son indemnité compensatrice de fin de contrat si la rupture dudit contrat n’a pas été provoquée par une faute grave de sa part, peu important qu’une faute de l’agent commercial ait été découverte postérieurement à la rupture du contrat.

 

Pour approfondir :

Le 1er septembre 2017, un particulier (ci-après « agent commercial ») a conclu un contrat d’agent commercial avec une société montpelliéraine spécialisée dans le commerce de voitures et de véhicules automobiles légers (ci-après « mandant »).

 

Le 17 juin 2021, l’agent commercial fait vainement signifier à son mandant une sommation de faire afin d’être remboursé de la somme qu’il a déboursé pour l’acquisition d’un véhicule.

Par ailleurs, le 13 septembre 2021, l’agent commercial a mis en demeure son mandant de lui régler son indemnité compensatrice de fin de contrat, ainsi que son indemnité de préavis. Cette mise en demeure est restée sans réponse.

Ledit contrat n’a jamais été expressément résilié par les parties, toutes deux s’accordent sur le fait que leur collaboration a de facto cessé en mars 2021.

Postérieurement, le mandant a évoqué des fautes commises par l’agent commercial pendant la durée du contrat afin de justifier son refus de s’acquitter de l’indemnité compensatrice envers ce dernier.

 

Le 21 octobre 2021, l’agent commercial a assigné son mandant aux fins de paiement de ses indemnités compensatrice et de préavis, ainsi que le reliquat de factures dues. Cependant, le Tribunal de commerce de Montpellier a débouté l’agent commercial de ses demandes au motif que le contrat a été rompu pour faute grave de ce dernier.

La question centrale posée à la Cour d’appel de Montpellier était la suivante : est-ce que le mandant peut se prévaloir de fautes commises par son agent commercial, découvertes postérieurement à la résiliation du contrat, pour refuser de s’acquitter de ses indemnités compensatrices et de préavis ?

La Cour d’appel répond par la négative à cette question au motif que les prétendues fautes de l’agent commercial n’étaient pas la cause de la rupture du contrat.

Dans un premier temps, la Cour d’appel rappelle qu’en cas de cessation des relations commerciales entre le mandant et son agent commercial provoquée par la faute grave de ce dernier, l’agent commercial ne peut pas prétendre à une indemnité compensatrice de fin de contrat (articles L.134-12 et L.134-13 du Code de commerce).

Pour rappel, une faute grave est une faute portant atteinte à la finalité commune du mandat d’intérêt commun, rendant impossible le maintien du lien contractuel, excluant pour l’agent commercial le bénéfice d’une indemnité compensatrice du préjudice subi en cas de cessation du contrat.

 

Cependant, dans un second temps, la Cour d’appel constate qu’aucune lettre de résiliation n’a été adressée à l’agent commercial en invoquant des fautes de sa part.

Puis, lesdites fautes de l’agent commercial ont été découvertes après la cessation du contrat entre les parties. Elles n’ont donc pas provoqué la cessation des relations commerciales entre l’agent commercial et le mandant.

 

Dès lors, l’agent commercial ne saurait être privé de son indemnité compensatrice de fin de contrat.

Pour le calcul de l’indemnité compensatrice, la Cour d’appel cumul la somme des commissions de l’agent commercial des deux dernières années du contrat.

A cela, elle y ajoute la somme due pour les trois mois de préavis dont a le droit l’agent commercial en vertu de l’article L.134-11 du Code de commerce.

 

Concernant le remboursement sollicité par l’agent commercial pour l’acquisition d’un véhicule, la Cour d’appel constate que l’agent commercial et le mandant collaboraient également ensemble, en dehors du contrat d’agent commercial, pour l’acquisition et la revente de véhicule.

A défaut de justification des conditions d’exercice de cette activité d’achat et de vente de véhicule, la Cour d’appel débouta l’agent commercial de sa demande.

 

A rapprocher : Cass. com., 16 nov. 2022, n° 21-17.423 ; CJUE, 28 octobre 2010, Volvo Car Germany GmbH, n° C-203/09 ; CJUE, 19 avril 2018, CMR c/ Demeures terre et tradition SARL, n° C-645/16.

 

Un article rédigé par Johanne Amable du département Concurrence, Distribution, Consommation