La primauté des statuts face aux engagements personnels des associés

La primauté des statuts face aux engagements personnels des associés

Cass. com., 9 juillet 2025, n° 23-21.160 (publié au Bulletin)

Ce qu'il faut retenir :

La Cour de cassation a jugé dans un arrêt rendu le 9 juillet 2025 (n° 23-21.160 publié au Bulletin) qu’un accord conclu entre associés dans un protocole d’investissement, constitue un engagement personnel qui ne lie pas la société et n’est pas contraire aux règles prévues par les statuts.

Cette décision offre une lecture différente de l’arrêt rendu le même jour par la chambre commerciale (Cass. com., 9 juill. 2025, n° 24-10.428 publié au Bulletin) qui a réaffirmé le principe selon lequel un acte extrastatutaire, en l’occurrence une décision unanime des associés, ne peut déroger ni contredire les statuts mais seulement les compléter.

Pour approfondir :

Dans cette affaire (n° 23-21.160), les associés majoritaires d’une holding détenant indirectement une société par actions simplifiée avaient signé un protocole d’investissement dans lequel ils s’engageaient à verser une indemnité forfaitaire au directeur général si celui-ci était révoqué moins de deux ans après sa nomination.

Les juges du fond avaient refusé d’accorder cette indemnité, considérant que cet acte extrastatutaire contredisait les statuts de la société, lesquels prévoyaient une révocation du dirigeant sans indemnité en leur article 16.

La Cour de cassation casse la décision d’appel (Cour d’appel de Nancy, 12 avril 2023) en s’appuyant sur le principe de la force obligatoire des contrats et estime que l’engagement personnel des associés n’était pas contraire aux statuts.

Elle retient alors que : « cette disposition extrastatutaire ne renferme qu’un engagement personnel des signataires du protocole d’investissement de faire le nécessaire pour que la décision de nomination de Monsieur X en qualité de directeur général de la société Y prévoie le versement d’une indemnité forfaitaire en cas de révocation ou de réduction de ses pouvoirs avant l’expiration d’un délai de deux ans, de sorte qu’elle n’est pas contraire à l’article 16 des statuts de la société ».

Elle considère que la promesse faite dans un protocole d’investissement n’engage pas la société mais uniquement les associés qui l’ont signée.

La Cour opère ainsi une distinction entre, d’une part, les relations entre la société et son dirigeant, strictement encadrées par les statuts, et d’autre part, les rapports entre les associés et/ou les dirigeants, dans lesquels un accord personnel peut produire, indépendamment des statuts, pleinement ses effets en vertu de la force obligatoire des contrats.

En conclusion, la Cour de cassation n’opère pas de revirement, mais affine sa jurisprudence. Elle admet que les engagements personnels souscrits par les associés dans le cadre d'un protocole, en l'espèce, déploient pleinement leurs effets obligatoires, y compris lorsqu’ils sont contraires aux stipulations statutaires.

Un article rédigé par Héléna DELHOTAL  du département Société Finance - Cession - Acquisition