Sanction disciplinaire : les preuves issues d’un dispositif de vidéoprotection conforme au RGPD sont recevables

Sanction disciplinaire : les preuves issues d’un dispositif de vidéoprotection conforme au RGPD sont recevables

Cass. soc., 21 mai 2025 – n° 22-19.925

 

Ce qu'il faut retenir :

Les images provenant d’un dispositif de vidéoprotection dont la finalité première est d’assurer la sécurité des biens et des personnes peuvent être réutilisées par l’employeur à des fins probatoires en cas de manquement du salarié aux règles de sécurité, dès lors que ce dispositif est conforme aux exigences prévues par le RGPD.

 

Pour approfondir :

Un agent de sûreté aéroportuaire, chargé du contrôle des bagages, a été licencié pour faute grave après avoir laissé passer deux valises sans procéder à leur inspection.

Pour établir ce manquement, l’employeur s’était appuyé sur des constats rédigés à partir des enregistrements du système de vidéoprotection installé dans l’aéroport.

Pour contester son licenciement, le salarié remettait en cause notamment la validité de ces preuves.

Il soutenait à ce titre que le dispositif de vidéoprotection dont la finalité était d’assurer la sécurité des biens et des personnes, avait été réutilisé pour une autre finalité, à savoir prouver son manquement aux règles de sécurité, sans information individuelle ni consultation des représentants du personnel par l’employeur et ce, en contradiction avec le RGPD.

A l’instar des juges du fond, la Cour de cassation écarte ces arguments.

En premier lieu, la Cour de cassation rappelle que l’utilisation de constats et d'attestations réalisés à partir de la captation et du visionnage des images issues du système de vidéoprotection d'un aéroport constitue un traitement de données à caractère personnel au sens de l'article 4 du RGPD. En effet, de telles images, si elles permettent d’identifier une personne physique, sont des données à caractère personnel.

A ce titre, la Cour de cassation rappelle que le dispositif de vidéoprotection mis en place par l’employeur doit respecter les obligations suivantes :

  • les images doivent être traitées de manière licite, loyale et transparente (article 5 du RGPD) ;
  • les images doivent être collectées pour des finalités déterminées et ne doivent pas être traitées ultérieurement d’une manière incompatible avec ces finalités (article 5 du RGPD) ;
  • le traitement de ces images doit être nécessaire à la sauvegarde des intérêts vitaux de la personne concernée ou d'une autre personne physique (article 6 du RGPD) ;
  • les personnes susceptibles d’être filmées doivent être informées des finalités du traitement et de leur droit d’accès aux images captées par le dispositif de vidéoprotection (articles 12, 13 et 14 du RGPD).

En second lieu, la Cour de cassation contrôle le respect par l’employeur des formalités requises pour la mise en place d’un tel dispositif, au regard notamment des règles susvisées :

  • le dispositif de vidéoprotection a préalablement été déclaré à la CNIL et a fait l’objet d’une autorisation préfectorale ;
  • l’existence du dispositif de vidéoprotection a été portée à la connaissance du public (tant les salariés que les clients de l’aéroport) de manière visible et accessible par un affichage sous forme de pictogramme. Par ailleurs, les représentants du personnel de l’aéroport ont été informés du recours à ce dispositif ;
  • Les images issues du dispositif de vidéoprotection ne sont accessibles que par un nombre limité de personnes et ce, pendant une durée limitée à cinq jours, assurant ainsi leur sécurité et leur confidentialité.

Au regard de ces éléments, la Cour de cassation considère que les images du salarié ont bien été collectées pour des finalités déterminées et légitimes, à savoir assurer la sécurité des personnes et des biens au sein de l’aéroport. Par ailleurs, elle juge que le salarié a été correctement informé des finalités du dispositif ainsi que de son droit d’accès aux images captées par ledit dispositif.

La Cour de cassation en conclut donc que la collecte des images du salarié était conforme au RGPD.

Par la suite, les images du salarié ont été réutilisées et ce, non pas pour assurer la sécurité des personnes et des biens au sein de l’aéroport, mais pour prouver le manquement du salarié aux règles de sécurité. Ce faisant, les images du salarié ont été utilisées pour une finalité différente de celle pour laquelle elles avaient été collectées.

Toutefois, la Cour de cassation considère que ces deux finalités sont compatibles au sens de l’article 5 du RGPD, de sorte que la réutilisation des images du salarié à des fins probatoires était, elle aussi, conforme au RGPD.

Dans ces conditions, la Cour de cassation juge que les moyens de preuve issus des images du dispositif de vidéoprotection sont recevables, et valide donc le licenciement pour faute grave du salarié.

 

A rapprocher :

Un article rédigé par Géraud D'Eyssautier du département Social et Ressources Humaines.