Irrecevabilité du moyen nouveau tiré de la violation du droit de la concurrence de l’UE soulevé pour la première fois devant la Cour de cassation

Irrecevabilité du moyen nouveau tiré de la violation du droit de la concurrence de l’UE soulevé pour la première fois devant la Cour de cassation

Cass, com., 15 mai 2024, n° 23-10.696

 

Ce qu’il faut retenir :

Le moyen tiré de la violation des règles européennes relatives aux pratiques anticoncurrentielles soulevé pour la première fois en cassation et alors que les premiers juges n’ont pas constaté l’affectation du sensible du commerce entre État membres est irrecevable comme nouveau et mélangé de fait et de droit conformément à l’article 619 du Code de procédure civile.

 

Pour approfondir :

En l’espèce, une société d’un des acteurs leader de la grande distribution en France avait conclu un contrat de location-gérance avec une autre société en vue de l’exploitation d’un fonds de commerce sous enseigne. Plusieurs années après la conclusion de ce contrat, le gérant a créé une seconde société pour exploiter un point de vente sous enseigne concurrente. Considérant que cette ouverture constituait une violation manifeste de leur clause de non-concurrence, la tête de réseau avait alors assigné en référé le gérant, ainsi que ses sociétés, en référé afin qu’il leur soit enjoint la suspension des travaux d’aménagement du fonds de commerce.

 

S’étant fait débouter, la société tête de réseau se pourvoi en cassation, et invoque, pour la première fois devant les hauts magistrats, que la primauté du droit européen sur le droit interne et l’application de l’article 101 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne (ci-après « TFUE ») commandent de constater la validité de la clause de non-concurrence litigieuse, et d’en faire application.

 

La Cour de cassation relève alors que la tête de réseau n’ayant jamais évoqué dans ses conclusions d’appel le fait que le commerce entre États membres pouvait être sensiblement affecté, et donc que l’article 101 du TFUE avait vocation à s’appliquer, ce moyen était nouveau et mélangé de fait et de droit en l'absence de constatation des premiers juges.

 

La Cour de cassation en a ainsi déduit l’irrecevabilité de ce moyen conformément à l’article 619 du Code de procédure civile.

 

Néanmoins, la Cour de cassation a tout de même pris le soin de préciser que même lorsqu’une pratique n'est pas interdite par le droit de l'Union, elle peut toujours être interdite par le droit national si elle a des effets restrictifs sur la concurrence au niveau national.

 

Un article rédigé par Clémence Berne, du département Concurrence, Distribution, Consommation