Un aveu ne permet pas d’établir les relations juridiques entre les parties
Cour de cassation, chambre commerciale, 25 juin 2025, n°23-21.074
Ce qu'il faut retenir :
Un aveu, qui est la déclaration par laquelle une personne reconnaît pour vrai un fait de nature à produire contre elle des conséquences juridiques (article 1383 du Code civil), ne permet pas, à lui seul, d'établir les relations juridiques entre les parties.
Pour approfondir :
Par contrat d’agence commerciale du 8 mars 2018 (ci-après le « mandat »), un mandant, spécialisé dans le commerce de confiseries, a donné mandat exclusif à son agent commercial de commercialiser ses produits de devant de caisse pour les hypermarchés Carrefour Hypers, Auchan Hypers et Leclerc. Le contrat avait été conclu pour une durée indéterminée pour les départements du var (83) et des Alpes-Maritimes (06).
En juin 2018, le mandant a étendu le mandat à 24 supermarchés situés sur le territoire contractuel.
De décembre 2019 à novembre 2020, le mandant n’a plus communiqué de relevés de commissions concernant les supermarchés.
Le mandant avait par la suite rompu unilatéralement le contrat.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 juin 2020, l’agent commercial a pris acte de cette rupture.
L’agent commercial a assigné le mandant et demandait sa condamnation au paiement d’une indemnisation compensatrice de préavis, d’une indemnité de cessation de mandat, des commissions arriérées et des dommages et intérêts pour préjudice commercial d’image et de réputation.
Par arrêt du 11 juillet 2023, la Cour d’appel de Montpellier a débouté l’agent commercial de ses demandes aux motifs que la rupture du contrat n’est pas imputable au mandant.
En effet, la Cour d’appel a jugé que le mandant aurait autorisé, à titre non contractuel, l’agent commercial à démarcher des supermarchés sur la même zone géographique et aux mêmes fins que pour les hypermarchés. L’agent commercial aurait lui-même reconnu que cette autorisation était donnée à titre non contractuelle en qualifiant l’ensemble de ces supermarchés de « clients non contractuels ». La Cour d’appel s’est alors servie de cet aveu pour déterminer la nature non contractuelle des supermarchés.
De plus, la Cour d’appel a considéré que l’extension au démarchage de certains supermarchés faisait l’objet d’une période d’essai de 18 mois, de juin 2018 à décembre 2019.
La question centrale posée à la Cour de cassation est la suivante : les rapports entre les parties peuvent-ils être établis par un aveu ?
La Cour de cassation a répondu à la question par la négative.
En effet, la Chambre commerciale juge que la Cour d’appel à violé les article 1103 et 1383 du Code civil car l’extension du mandat est nécessairement contractuelle, même si elle est assortie d’une période d’essai, peu important que l’agent commercial est pu considérer que les supermarchés étaient des « clients non contractuels ».
Concernant la période d’essai, la Haute juridiction rappelle les règles de la charge de la preuve. En effet, ce n’est pas à l’agent commercial de prouver qu’il n’existait pas de période d’essai entre les parties, mais c’est bien au mandant, qui se prévaut de cette période d’essai, de prouver que celle-ci était convenue entre les parties.
À rapprocher :
- CA Montpellier, ch. com., 11 juillet 2023, n° 21/0992
Un article rédigé par Johanne AMABLE du département Droit de la Distribution | Concurrence | Consommation