Droit pénal de l’environnement : Nouvelle CJIP
Le Président du Tribunal judiciaire de Marseille a validé par ordonnance[1], le 17 mai 2022, la Convention judiciaire d’intérêt public (CJIP) conclue le 15 avril 2022[2] par la procureure de la République près le Tribunal judiciaire de Marseille et la société TUI CRUISES GmbH.
Après une mise en balance des facteurs majorants et minorants, la société s’est engagée à verser, dans un délai d’un mois, une amende d’intérêt public de 60.000 euros.
La CJIP en matière environnementale a été introduite à l’article 41-1-3 du code de procédure pénale par la loi du 24 décembre 2020 relative au parquet européen, à la justice environnementale et à la justice spécialisée[3]. Elle permet au procureur de la République de proposer un accord à une société lorsque cette dernière est mise en cause pour un délit environnemental.
La peine d’amende encourue dans le cadre de cet accord peut atteindre 30 % du chiffre d’affaires de la société et la société peut également se voir imposer une peine de mise en conformité et une obligation de réparation du préjudice écologique causé dans un délai maximum de 3 ans.
Sous réserve de l’exécution de la CJIP, sa validation par le Président du Tribunal judiciaire acte la fin des poursuites.
En l’espèce, une enquête préliminaire était ouverte le 27 octobre 2018, et confiée par le parquet à la brigade de recherches de la gendarmerie maritime de Marseille, à la suite du contrôle effectué par le Centre de sécurité des Navire PACA-CORSE du combustible de propulsion à bord du navire de croisière MEIN SCHIFF 2 à son arrivée au port de Marseille. L’objectif de ce contrôle était de vérifier les émissions de soufre réalisées.
Les investigations ont permis d’établir que le navire en question utilisait un combustible dont la teneur en soufre était supérieure à 1,5 % en masse (seuil applicable) en Zone Economique Exclusive (ZEE) en Méditerranée.
Les faits étaient susceptibles de caractériser le délit d’utilisation, par un navire au-delà de la mer territoriale, de combustible dont la teneur en soufre est supérieure aux normes autorisées et constituant une pollution de l’air[4].
La société risquait une amende d’intérêt public d’au maximum 322.473 euros, soit 30 % de son chiffre d’affaires moyen, et le gain financier résultant de la différence de prix était estimé à 1.904,86 euros
Dans le cadre de la CJIP, ont été pris en compte les facteurs suivants :
- - Facteur majorant : nocivité des rejets d’oxydes de soufre dans l’atmosphère ;
- - Facteurs minorants :
- - Réaction rapide et instruction aux différents personnels concernés au sein des filiales ;
- - Actions de prévention et de compensation environnementale : intégration dans les procédures de l’exigence d’utilisation d’un combustible dont la teneur en soufre est inférieure au seuil fixé par la loi française en ZEE française en Méditerranée ;
- - Absence d’antécédents et de réitération.
La société a été condamnée à une amende d’intérêt public d’un montant de 60.000 euros et ne s’est pas vu opposer une peine de mise en conformité dès lors qu’elle avait, à son initiative, régularisé la situation.
Nos préconisations :
- - Etablir une cartographie des risques en amont ;
- - Mettre en œuvre un programme de conformité ;
- - Etablir et mettre en place des actions de remédiation dès la découverte de l’infraction ;
- - Former et sensibiliser les personnels clés ;
- - Réaliser des contrôles relatifs à la procédure impliquée par l’infraction.
A rapprocher :
[1] Loi n° 2020-1672 du 24 décembre 2020 relative au Parquet européen, à la justice environnementale et à la justice pénale spécialisée
[2] Prévus par les articles L. 218-15, L. 218-2, L. 218-16 et L. 218-18 du code de l’environnement
[3] Ordonnance de validation d’une convention judiciaire d’intérêt public, 17 mai 2022, n° 2022-00063
[4] Convention judiciaire d’intérêt public, 15 avril 2022, n° Parquet : 18-348-000365
Un article rédigé par David Marais et Julie Guenand, du département Droit pénal pénal de l'entreprise, Compliance, RSE & Intelligence économique