Refus d’agrément du candidat repreneur par le franchiseur
CA Montpellier, 6 mai 2025, n°23/05066
Ce qu'il faut retenir :
Le refus d’agrément d’un candidat repreneur ne peut être qualifié d’abusif dès lors qu’il est légitime pour un franchiseur de s’assurer que le candidat-repreneur est en mesure de fournir une prestation au moins équivalente à celle fournie par le franchisé sortant, ceci afin de pérenniser son réseau.
Pour approfondir :
En 2014, un franchiseur spécialisé en équipement de la maison a conclu un contrat de franchise avec un franchisé.
Trois ans plus tard, en 2017, le franchisé informe son franchiseur de la signature d’un acte de cession de son fonds de commerce, sous réserve de la purge du droit de préemption.
Après avoir rencontré le repreneur, la tête de réseau a refusé d’agréer l’opération compte tenu du prix de cession du fonds de commerce qui ne lui paraissait pas cohérent par rapport au chiffre d’affaires et aux résultats réalisés par le franchisé.
Suite à ce refus, le franchisé a décidé de résilier le contrat de franchise.
En 2021, le franchisé a assigné le franchiseur en vue d’obtenir réparation, considérant que le refus d’agrément du franchiseur était abusif et l’aurait empêché de vendre son fonds de commerce à un repreneur sérieux.
Il faisait notamment valoir que la motivation du refus d’agrément par le franchiseur était caractéristique d’un abus de droit. Selon lui, aucun grief n’avait été formulé à l’égard du candidat repreneur pour refuser l’agrément mais uniquement des réserves attenantes au prix de cession proposé.
Le Franchiseur répliquait qu’une lecture littérale de la clause d’agrément démontrait bien que l’agrément portait sur l’opération et, le cas échéant, le repreneur-acquéreur, la documentation stipulée dans la clause visant en effet à lui permettre d’opérer un contrôle sur les conditions financières de l’opération, et a fortiori, sur la moralité et la surface financière du repreneur.
Pour la Cour, il est en effet « tout à fait normal pour un franchiseur de s’assurer de la possibilité pour un candidat repreneur de fournir une prestation au moins équivalente à celle fournie par le franchisé sortant, ceci afin de pérenniser son réseau ».
Néanmoins, ce droit d’agrément est limité par l’abus qui pourrait en être fait.
En l’espèce, le franchiseur avait motivé son refus par plusieurs éléments objectifs :
- le prix de cession n’était pas cohérent par rapport au chiffre d’affaires et aux résultats réalisés par le franchisé,
- le prix de cession ne tenait pas en compte du montant minimum de 150.000 euros nécessaire à la mise au concept du magasin, ou encore que la rémunération du dirigeant n’était pas réaliste au regard de l’emprunt à contracter pour le financement de l’acquisition des droits sociaux, et des travaux de rénovation.
Face à de telles justifications, la Cour a conclu à l’absence d’abus du franchiseur dans l’exercice de son droit d’agrément.
Elle a estimé que « (le franchiseur) qui exprime des craintes quant à la sauvegarde de ses intérêts commerciaux, elles-mêmes justifiées par la capacité du candidat repreneur à exécuter ses obligations au sein du réseau, a motivé, sans abus, le refus d’agrément signifié aux appelants. »
La clause d’agrément portait tant sur la personne du repreneur que sur l’opération de cession elle-même, ce qui légitimait l’examen du montage financier proposé.
Par conséquent, la Cour a jugé que le refus d’agrément n’était pas abusif et a rejeté les demandes indemnitaires du franchisé.
A rapprocher :
Un article rédigé par Claire Saadoun du département Droit de la Distribution | Concurrence | Consommation