Clause statutaire d'exclusion d'un associé - Clause privant cet associé de son droit de vote

Clause statutaire d'exclusion d'un associé - Clause privant cet associé de son droit de vote

Cass. Com., ch commerciale financière et économique, 29 mai 2024, n°22-13.158

 

Ce qu’il faut retenir :

Si les statuts d'une société par actions simplifiée peuvent prévoir l'exclusion d'un associé par une décision collective des associés, toute stipulation de la clause d'exclusion ayant pour objet ou pour effet de priver l'associé dont l'exclusion est proposée de son droit de voter sur cette proposition est réputée non écrite.

 

Pour approfondir :

La société par actions simplifiée est une forme de société caractérisée notamment par une importante liberté contractuelle.

 

Elle permet par exemple, de stipuler un mécanisme statutaire d’exclusion, c’est-à-dire un droit accordé aux associés d’exclure l’un des leurs à titre de sanction ou au motif de certaines incompatibilités.

 

Le principe est d’ailleurs consacré par l’article L227-16 al. 1 du code de commerce selon lequel « dans les conditions qu’ils déterminent, les statuts peuvent prévoir qu’un associé peut être tenu de céder ses actions. ».

 

Par ailleurs, il est rappelé que depuis la loi Soihili du 19 juillet 2019, l’unanimité des associés n’est plus exigée pour l’insertion ou la modification d’une clause statutaire d’exclusion d’un associé au sein d’une SAS.

 

Pour autant, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler à plusieurs reprises que les clauses d’exclusion ne sont valides que sous réserve de ne pas porter atteinte aux droits fondamentaux des associés.

 

Ainsi, il a été jugé dans le cadre des arrêts Arts et Entreprises (Cass. com., 23 oct. 2007, n° 06-16537, Bull.) que la clause d’exclusion statutaire ne peut empêcher l’associé visé par la procédure d’exclusion de participer à la procédure d’exclusion et de prendre part au vote.

 

Cette décision n’avait rien d’évident de telle sorte que de nombreux statuts de SAS comportent encore des clauses selon lesquelles l’associé visé par l’exclusion ne peut prendre part au vote.

 

Pour autant les professionnels du droit ont dû recommander une extrême vigilance en la matière dans la mesure où il a également été jugé qu’une clause statutaire d’exclusion prévoyant l’interdiction pour l’associé dont l’exclusion est envisagée de participer à la réunion ou à prendre part au vote est réputée non écrite dans sa totalité, sur le fondement de l’article 1844-10 du Code civil (Cass. com. 9 juillet 2013, n°11-27.235).

En conséquence, l’exclusion prononcée en application d’une telle clause est nulle, quand bien même en pratique, l’associé aurait été invité à participer au vote (Cass. com. 6 mai 2014, n°13-14.960). L’exclusion de l’associé ne pouvait donc pas être prononcée tant que les statuts n’avaient pas été modifiés en vue d’écarter l’interdiction de participer à l’assembler ou de voter.

 

Dans la lignée des décisions précitée, l'arrêt du 29 mai 2024 juge qu' "il résulte de la combinaison [des art. 1844 et 1844-10 du Code civil et L. 227-16 du Code de commerce] que si les statuts d'une société par actions simplifiée peuvent prévoir l'exclusion d'un associé par une décision collective des associés, toute stipulation de la clause d'exclusion ayant pour objet ou pour effet de priver l'associé dont l'exclusion est proposée de son droit de voter sur cette proposition est réputée non écrite".

 

Les lecteurs attentifs de l’arrêt pourront noter que désormais la Cour de cassation n’a pas considéré que toute la clause d’exclusion était réputée non écrite, mais seulement la stipulation selon laquelle l’associé visé par l’exclusion ne pouvait participer au vote.

 

Nous rappellerons enfin que les statuts d’une SAS peuvent confier le pouvoir d’exclusion à un autre organe que la collectivité des associés (par exemple, le Président, ou encore un organe de surveillance tel qu’un conseil de surveillance).

 

A rapprocher :

  • - com., 23 oct. 2007, n° 06-16537, Bull.
  • - com., 9 juil. 2013, n° 11-27235, Bull.
  • - com. 6 mai 2014, n°13-14.960
  • - Articles 1844 et 1844-10 du Code civil
  • - Article L227-16 al. 1 du Code de commerce

 

Un article rédigé par Eric Kopelman, du département Corporate.