Avertir un salarié de son licenciement par téléphone, peut invalider celui-ci

Avertir un salarié de son licenciement par téléphone, peut invalider celui-ci

Ccass Soc 3 avril 2024, n° 23-10.931

 

Ce qu’il faut retenir :

Le fait pour un employeur d’informer un salarié de son licenciement par téléphone, avant l’envoi de sa lettre de licenciement, est considéré comme un licenciement verbal qui est, par conséquent, sans cause réelle et sérieuse.

Peu importe que l’employeur justifie cette démarche par la volonté d’épargner au salarié l’annonce publique de sa rupture.

 

Pour approfondir :

Dans cette affaire, un salarié avait été informé de son licenciement pour faute grave par la Directrice des ressources humaines au cours d’un appel téléphonique, le jour de l’envoi de la lettre de licenciement. Cette dernière avait ainsi souhaité éviter au salarié de se présenter à une réunion le jour même et de se voir congédier devant ses collègues.

 

Considérant qu’il s’agissait d’un licenciement verbal, le salarié avait contesté la rupture de son contrat de travail et obtenu gain de cause auprès des Juges du fond.

 

Pour rappel, l’employeur qui décide de licencier un salarié doit lui notifier sa décision par lettre recommandée ou remise en main propre. Cette dernière doit comporter l’énoncé du ou des motifs de la rupture du contrat de travail (C. trav art L.1232-6).

 

De plus, la rupture de contrat de travail se situe à la date ou l’employeur a manifesté sa volonté d’y mettre fin, c’est-à-dire au jour de l’envoi de la lettre recommandée notifiant le licenciement (Ccass soc 6 mai 2009, n°08-40.395)

 

La question était donc ici de savoir si l’appel téléphonique avait précédé l’envoi de la lettre de licenciement ou si cet appel avait été émis après l’envoi de la lettre.

 

En l’absence d’élément permettant de démontrer si l’appel avait précédé ou non la lettre, la Cour de cassation a validé la décision d’appel, considérant que le licenciement était dépourvu de cause réelle sérieuse, considérant que :

« Cet appel téléphonique ne pouvait suppléer la lettre de licenciement adressée ultérieurement, même si elle avait été adressée le même jour, sous la signature de l’auteur de l’appel téléphonique ».

Cette décision permet ainsi de rappeler aux employeurs que le fait d’annoncer au salarié l’envoi de sa lettre de licenciement, même si cela part d’une bonne intention, est susceptible d’invalider celui-ci.

 

Une telle pratique est donc à éviter, sauf à appeler le salarié, après l’envoi de la lettre de licenciement et à disposer d’un bordereau d’accusé de réception faisant apparaitre la date et l’heure de l’envoi, démontrant ainsi l’antériorité du licenciement par rapport à l’appel.

 

A rapprocher : Article L.1232-6 du Code du travail ; Ccass soc 6 mai 2009, n°08-40.395.

 

Un article rédigé par  Annaël Bashan et Morgane Tarrisse, du département droit Social