Rigueur face à la qualification des clauses abusives
Tribunal Judiciaire de Paris, 28 juin 2022, RG n°18/00477
Le caractère abusif d’une clause repose sur la preuve de l’existence d’un déséquilibre significatif au sens de l’article L. 212-1 du code de la consommation. Bien qu’une très large jurisprudence autour des clauses abusives se soit construite ces dernières années, les juges maintiennent qu’il n’est pas opportun de chercher des clauses abusives en tout lieu.
L’association d’aide aux consommateurs UFC-Que Choisir a été déboutée le 28 juin dernier par le Tribunal judiciaire de Paris dans l’affaire l’opposant à la société SNCF-C6, connu aussi sous le nom Ouibus et récemment rachetée par Blablacar, qui propose aux voyageurs des trajets en autocar.
En l’espèce, l’UFC-Que Choisir reprochait à la société de conserver plus d’une vingtaine de clauses contraires au code de la consommation au sein de ses conditions générales de vente et de sa chartre de confidentialité.
Les juges du fond ont commencé par établir que les demandes de l’association portant sur les clauses de 2017 remplacées en 2018 par de nouvelles clauses conformes au code de la consommation, étaient irrecevables. En effet, en raison de la nature des contrats passés entre le transporteur et les consommateurs, lesquels sont à exécution instantanée, les anciennes clauses de 2017 ne sont donc plus en vigueur – concrètement, les anciennes clauses ne produisent plus d’effets entre les parties.
Après cet examen préliminaire de l’irrecevabilité d’une partie des demandes de l’association, le tribunal s’est penché sur chacune des clauses litigieuses.
1. Les clauses litigieuses prévues aux conditions générales de ventes
Tout d’abord, les juges ont examiné différentes clauses des CGV, notamment :
- - la clause reprenant une citation tronquée de l’article 1218 du code civil portant sur la force majeure a été jugée licite. En effet, la référence à l’article 1218 du code civil est suffisante car les consommateurs peuvent en tout état de cause consulter le texte en entier s’ils le souhaitent.
- - le fait que l’agent d’accueil renvoie oralement les consommateurs aux CGV suffit si les CGV ont été communiquées, préalablement à l’exécution de la prestation, sur un support durable à l’adresse électronique du passager.
- - la clause faisant supporter aux consommateurs l’annulation en cas de d’absence de paiement du prix résultant d’un cas de force majeure été jugée valide.
2. Les clauses litigieuses prévues à la charte de confidentialité
Les juges ont également revus quelques clauses issues de la charte de confidentialité du transporteur.
Notamment, la clause permettant au transporteur d’utiliser les données collectées sur ses clients, lors de la vente de billets, à des finalités de « communication promotionnelle, commerciale ou d’information » a été déclarée licite par les juges. Les juges ont rappelé que la clause devrait être lue dans son contexte. En effet, bien que les consommateurs ne puissent s’y opposer qu’ultérieurement, la clause est valide car l’utilisation de leurs données est faite dans le seul intérêt du transporteur d’assurer sa communication promotionnelle.
En définitive, toutes les clauses attaquées par l’UFC-Que Choisir ont été étudiées dans leur contexte, et considérées comme valides, octroyant un pouvoir spécifique à l’entreprise de transport sans pour autant que ce pouvoir concourt à la création d’un déséquilibre significatif entre les parties.
A rapprocher :
Cass., 1ère civ., 15 juin 2022, n°18-16.968 ; Cass. 1ère civ., 16 mai 2018, n°17-11.337.
Un article rédigé par le département Distribution, Concurrence, Consommation