Une inquiétude concernant l’organisation des JO Paris 2024 a refait surface ce 28 mai 2022. En cause, la polémique des « faux billets » utilisés au Stade de France dans le cadre de la final de la Ligue des Champions opposant Liverpool et le Real Madrid. Le sujet sensible du trafic de billets a de nouveau émergé, alors même que celui-ci existe depuis de nombreuses années dans l’univers du sport et plus largement dans le secteur de l’évènementiel. Le trafic de billets correspond à plusieurs difficultés parmi lesquelles figurent la vente de billets sans autorisation, la vente de faux billets et la vente de billets en plusieurs exemplaires et/ou à des prix supérieurs à leur valeur faciale.
La vente de billets sans autorisation
Les fédérations sportives et les organisateurs de manifestations sportives sont propriétaires du droit d’exploitation des manifestations ou compétitions sportives qu’ils organisent[1], ce pourquoi la gestion de la vente des billets d’accès leur appartient [2].
Rien ne leur interdit par ailleurs de soumettre la revente de ces billets à des conditions particulières, permettant ainsi de déterminer si un agrément à la revente est donné.
La commercialisation des billets d’accès aux manifestations sportives a fait naître un marché parallèle et illégal qui n’a fait que s’accentuer avec le développement d’internet. En effet, les enceintes sportives ont toujours été le témoin de ventes à la sauvette de billets en totale illégalité mais cette pratique s’est désormais étendue.
La vente à la sauvette correspond à la vente de biens ou l’exercice de toute autre profession sans autorisation ou déclaration régulière dans un lieu public. Ce délit est puni de 6 mois d’emprisonnement et de 3.750 euros d’amende à moins que l’auteur ne paie le versement d’une amende forfaitaire de 300 euros[3].
Cette infraction ne réprime que la vente à la sauvette dans un lieu public et ne prend pas en compte la revente de billets sur internet, fléau actuel. Est donc réprimée de manière plus spécifique la vente, notamment sur internet, la cession ou la fourniture de moyens aux fins de vendre des titres d’accès à une manifestation sportive, culturelle ou commerciale ou à un spectacle vivant, lorsqu’elle est réalisée de manière habituelle et sans autorisation du producteur, de l’organisateur ou du propriétaire des droits d’exploitation. Cette infraction n’est punie que d’une amende de 15.000 euros[4].
Qu’on se rassure, l’objectif de cette disposition est de sanctionner les personnes pour qui la revente de billets constitue une activité professionnelle habituelle[5] et non la personne qui, ne pouvant pas se rendre à son évènement, essaye de le revendre pour ne pas perdre d’argent. Dès lors, une personne qui vendrait de temps en temps des billets par le biais d’internet reste en dehors de l’incrimination. Attention toutefois, lorsque les billets sont nominatifs, il n’est pas possible de les céder car ils ne sont pas utilisables par l’acheteur.
La vente de faux billets
Outre la vente sans autorisation, il arrive que de faux billets soient mis en vente, empêchant ainsi parfois la personne détentrice de ce billet d’assister à l’évènement.
Le faux correspond à une altération frauduleuse de la vérité d’un écrit ou d’un autre support s’il établit la preuve d’un droit ou d’un fait entraînant des conséquences juridiques. L’usage de faux est le fait d’user d’un faux en toute conscience[6].
Un billet d’accès à un évènement est considéré comme un contrat, ce qui signifie que son altération ou sa fausse fabrication (faux billet composé de fausses informations) entrainent un préjudice pour l’acheteur (impossibilité d’accéder au stade) ou l’organisateur, et peuvent donc être réprimées par l’infraction de faux. Son usage conscient par le vendeur ou l’acheteur est réprimé par l’infraction d’usage de faux.
Dans le cadre de l’affaire du Stade de France, il ne s’agissait pas réellement de « faux billets », comme ont pu le dire certains journalistes et hommes politiques, mais de billets qui avaient été vendus en plusieurs exemplaires.
La vente de billets en plusieurs exemplaires et/ou à un prix supérieur
L’escroquerie est le fait, par l’usage d’une fausse qualité, notamment celle de revendeur agréé, ou par l’emploi de manœuvres frauduleuses, notamment l’usage de logos ou d’images laissant croire à un partenariat, de tromper une personne pour qu’elle remette des fonds. Ce délit est passible de 5 ans d’emprisonnement et de 375.000 euros d’amende[7].
Ainsi, lorsqu’un vendeur en ligne propose aux supporters d’acheter des billets d’accès à des évènements sportifs, en leur faisant croire qu’elle détient un agrément pour cette vente, il peut être poursuivi pour des faits d’escroquerie lorsque ces billets ont été vendus à plusieurs exemplaires et/ou ces billets ont été vendus à un prix supérieur à la valeur faciale.
Dans ce cas, le préjudice de la victime peut être double puisqu’elle aura payé le prix du billet à une valeur nettement supérieure à la valeur faciale et elle ne pourra pas accéder à l’évènement, comme ce fut le cas pour des milliers de supporters au Stade de France, engendrant des scènes de violence.
Mes préconisations :
- N’achetez pas vos billets dans la rue devant le lieu de l’évènement mais uniquement en point de vente ;
- Lorsque vous achetez en ligne, vérifiez que le revendeur est agréé ;
Si vous êtes victimes des faits décrits, que vous soyez supporter ou organisateur de la manifestation sportive, déposez une plainte auprès du commissariat ou de la gendarmerie
Références :
[1] Article L. 333-1 du code du sport.
[2] TGI Paris, 25 janvier 2018, n° 17/13903.
[3] Article 446-1 du code pénal.
[4] Article 313-6-2 du code pénal - Loi n° 2012-348 du 12 mars 2012.
[5] TGI Paris, 20 mai 2014, n° 14/00899, Viagogo.
[6] Article 441-1 du code pénal.
[7] Article 313-1 du code pénal.
Un article rédigé par Julie Guenand, avocate en droit pénal de l'entreprise chez Simon Associés.