Ce qu’il faut retenir :
Pour satisfaire aux exigences posées par l’article 656 du Code de procédure civile lors de la signification d’une décision de justice ou d’une assignation, l’huissier ne peut se satisfaire d’une confirmation d’adresse par « le voisinage » ou d’une confirmation par un « employé », il doit effectuer toutes les diligences pour vérifier l’adresse du destinataire. Il ne peut se prévaloir que le nom figurait sur la boîte aux lettres sans l’avoir précisé sur les actes délivrés.
S’il est retenu que l’huissier de justice n’a pas effectué les diligences nécessaires, la Cour d’appel est fondée à retenir un grief causé à l’appelante par l’irrégularité de la signification faite à son ancienne adresse.
Pour approfondir :
L’article 656 du Code de procédure civile énonce les conditions dans lesquelles une signification faite à domicile est régulière. L’huissier de justice doit notamment vérifier que le destinataire demeure bien à l’adresse indiquée et en faire mention dans l’acte de signification.
En l’espèce, Monsieur et Madame X ont divorcé. Par acte d’huissier de justice en date du 13 octobre 2017, Monsieur a assigné Madame en suppression de la prestation compensatoire et de la rente viagère mise à sa charge. Le juge aux affaires familiales a fait droit à la demande de Monsieur par une ordonnance du 8 janvier 2018, qui a été signifiée à Madame le 25 janvier 2018.
Par un arrêt du 12 décembre 2019, la Cour d’appel de Paris a constaté la nullité de la signification de l’ordonnance en relevant que l’acte de signification n'indiquait pas que la boîte aux lettres portait le nom de Madame et ne précisait pas les conditions dans lesquelles le voisinage avait confirmé l'adresse de Madame à l’huissier. En outre, la Cour d’appel a également prononcé la nullité de l’assignation du 13 octobre 2017, en soulignant que l’acte de signification ne mentionnait pas des vérifications suffisantes relatives au domicile de Madame.
Monsieur s’est pourvu en cassation. Au soutien de son pourvoi, il a fait valoir que pour prononcer la nullité de la signification de l’ordonnance et de l’assignation, les juges du fond n’ont pas constaté que la preuve avait été faite de l’absence du nom de Madame sur la boîte aux lettres, mais qu’ils l’avaient déduit de l’absence de précision dans l’acte délivré par l’huissier de justice.
En outre, le demandeur au pourvoi reprochait à la Cour d’appel d’avoir prononcé la nullité de la signification du 25 janvier 2018 alors que « le lieu de signification était corroboré par la boîte aux lettres, par les déclarations du voisinage et par le fait que Madame avait habité là pendant plusieurs années ». Il soutenait que les juges du fond auraient pu confirmer l’adresse de Madame par l’absence de retour à l’étude de l’huissier de la lettre simple qui lui avait été envoyée.
Enfin, Monsieur soutient que la nullité de la signification de l’ordonnance et de l’assignation ne pouvait pas être prononcée par la Cour d’appel sans rechercher ni constater si Madame prouvait habiter à une autre adresse que celle où les actes litigieux ont été délivrés, ni même sans démontrer en quoi les vices de forme des actes auraient causé un grief à Madame.
Le 14 avril 2022, la Cour de cassation rejette le pourvoi, en rappelant que « d’une part, l’huissier de justice n’avait pas effectué d’autres diligences que de se faire confirmer l’adresse par « le voisinage », le 25 janvier 2018, et par « un employé » le 13 octobre 2017, et qu’il n’avait indiqué, ni sur les deux actes délivrés, ni sur le courrier envoyé ensuite que le nom figurait sur la boîte aux lettres », et « d'autre part, que celui-ci n'avait pas ainsi effectué les diligences nécessaires, (…) qui a ainsi fait ressortir l'existence d'un grief causé à l'appelante par l'irrégularité des deux significations à son ancienne adresse, dont les mentions ne répondaient pas aux exigences de l'article 656 du code de procédure civile ».