Inaptitude et reclassement en télétravail

Inaptitude et reclassement en télétravail

Ccass soc 29 mars 2023, n°21-15.472

Ce qu’il faut retenir :

En cas d’inaptitude, l’employeur ne peut s’opposer à une solution de reclassement en télétravail au motif que celui-ci n’a jamais été mis en place pour aucun poste dans l’entreprise.

 

Pour approfondir :

Dans cette affaire, une salariée occupant le poste d’assistance coordinatrice d’équipe pluridisciplinaire au sein d’un service de santé au travail avait été déclarée inapte à son poste par le médecin du travail.

Ce dernier précisait aux termes de son avis, qu’elle pourrait occuper « un poste administratif sans déplacement et à temps partiel (2 j par semaine) en télétravail avec aménagement du poste approprié ».

 

Dix mois plus tard, la salariée a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement au motif qu’il était impossible, pour l’employeur, d’aménager du télétravail pour son poste car ce mode d’organisation n’était pas utilisé au sein de l’entreprise. L’employeur estimait également que le télétravail n’était pas compatible avec son poste compte tenu du secret professionnel qui y était attaché.

 

La salariée a contesté son licenciement qu’elle estimait dépourvu de cause réelle sérieuse, au regard du manquement de l’employeur à son obligation de reclassement.

 

La Cour d’appel a donné de cause à la salariée au motif que « le télétravail faisait partie intégrante de l’obligation de reclassement incombant à l’employeur ».

 

L’employeur s’est pourvu en cassation et faisait valoir qu’il ne pouvait se voir imposer un reclassement par le télétravail au motif que celui-ci n’a jamais été mis en place au sein de l’entreprise.

 

La Cour de cassation a rejeté cette argumentation, considérant que l’employeur n’avait pas loyalement exécuté son obligation de reclassement dès lors que le poste pouvait être exercé à domicile et que le télétravail pouvait être mis en place par un simple avenant au contrat de travail, sans que celui-ci n’ait à être déjà prévu au sein de l’entreprise. La chambre Sociale a ainsi rappelé, conformément aux dispositions du Code du travail (articles L.1226-2 et L.1226-10), qu’ « il appartient à l’employeur de proposer au salarié, loyalement, en tenant compte des préconisations et indications du médecin du travail, un autre emploi approprié à ses capacités, aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail ».

 

Rappelons ici que « l'employeur est tenu de prendre en considération l'avis et les indications ou les propositions émis par le médecin du travail en application des articles L. 4624-2 à L. 4624-4. En cas de refus, l'employeur fait connaître par écrit au travailleur et au médecin du travail les motifs qui s'opposent à ce qu'il y soit donné suite. » (article L.4624-6 du Code du travail).

 

L’employeur doit donc tenir compte des préconisations du médecin du travail qui peuvent comporter un aménagement en télétravail. Il peut également refuser celui-ci en précisant les motifs valables qui s’y opposent. A cet égard, l’absence de mise en place du télétravail au sein de l’entreprise, ne justifie pas le refus d’aménager un poste en télétravail.

 

A rapprocher :

  • - Article L.4624-2 à L.4624-41226-10 du code du travail
  • - Article L.1226-12 du même code

 

Un article rédigé par Morgane Tarrisse, Ambre Corbin, et Annaël Bashan du département droit Social